Les facteurs émotionnels jouent un rôle non négligeable lors des négociations de vente. L’intelligence émotionnelle, notamment, constitue un atout essentiel quand il s’agit de se mettre dans la peau de l’autre, de mener une discussion sur un pied d’égalité et d’essayer de trouver un compromis.

Esther Haupt, membre de l’équipe Transaction Advisory d’UBS, a accompagné de nombreuses success-stories, mais a également assisté à des ruptures de négociations. Elle partage ici son top 5 des raisons pouvant entraîner une rupture de négociations et explique comment négocier de façon fructueuse et venir à bout des situations de négociation les plus délicates.

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Raison 1: absence d’accord sur le prix de vente

Si le prix de vente constitue la pierre angulaire de toute négociation, il peut également se révéler un facteur de sa rupture. Ainsi, le vendeur et l’acheteur peuvent avoir une conception diamétralement opposée de la composition du prix de vente.

Les vendeurs présentent un attachement émotionnel à leur entreprise. En tant que propriétaires, ils ont longtemps été à la tête de la société et ont contribué à son succès dans une large mesure.
Quand ils décident de vendre l’entreprise, ils s’attendent légitimement à ce que leur engagement de tout instant se traduise également dans le prix de vente.

Les acheteurs, en revanche, ne connaissent pas l’histoire de la société dans son intégralité et se fondent principalement sur les chiffres des cinq dernières années et sur le potentiel commercial futur pour définir leur offre de prix. Par conséquent, le prix proposé ne peut pas toujours faire honneur à l’engagement assidu des vendeurs.

La solution
Acheteur ou vendeur: la règle d’or consiste à faire preuve de compréhension. C’est précisément parce que les deux partenaires de négociation ont, par nature, des perspectives divergentes concernant l’entreprise qu’il convient d’examiner de façon plus approfondie les raisons des conceptions tarifaires respectivement élevées ou basses des interlocuteurs. En leur qualité de médiateurs, les conseillers externes favorisent la compréhension mutuelle et peuvent assurer un niveau de discussion constructif aux négociations de vente.

Conseil en prime: en tant que vendeur, donnez à l’acheteur la possibilité de s’acquitter d’une partie du montant destiné à l’acquisition de l’entreprise à un moment ultérieur. Vous pouvez négocier cette démarche soit sous forme d’earn-out, où un montant tributaire des performances est versé en plus du prix de vente convenu, soit en concluant un prêt vendeur. Dans ce cas, en tant que vendeur, vous laissez momentanément en suspens une partie du prix, accompagnez le nouveau propriétaire pendant une certaine période et percevez le solde au moment où l’acheteur reprend la société dans son intégralité. Grâce à ces deux options, vous prenez en compte les différentes conceptions de prix dans le cadre des négociations et évitez de surcroît qu’elles se soldent par un échec.

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Raison 2: conceptions différentes de la participation à l’entreprise

Les acheteurs potentiels partent généralement du principe qu’ils peuvent acquérir la société dans son ensemble. Bien que les deux parties entament normalement les négociations de vente sur la base de cette hypothèse, il n’est pas rare que le vendeur change de ligne de conduite. Ainsi, il se peut qu’il ne soit subitement plus disposé à céder l’entreprise dans son intégralité. Ou, pire encore: il décide de ne proposer que la moitié de la société à l’acheteur, afin de conserver une participation majoritaire et la souveraineté décisionnelle. Ces changements de cap inopinés peuvent ébranler la confiance des acheteurs potentiels et susciter leur désarroi.

La solution
Les deux conseils suivants vous permettront d’établir une relation de confiance solide avec l’acheteur:

  1. Préparez-vous émotionnellement à la vente en vous détachant de l’entreprise et en signalant à votre interlocuteur votre disposition à vendre. Le lâcher-prise peut être favorisé par la poursuite d’un nouveau passe-temps intensif ou d’un engagement bénévole exercé avec passion.
  2. Entamez les négociations avec des intentions sans équivoque: si vous souhaitez effectivement conserver une partie de la société, cette ambition doit être thématisée en priorité lors des discussions. Outre une part fixe, offrez également à l’acheteur la perspective de pouvoir éventuellement reprendre l’ensemble de l’entreprise à un moment ultérieur. En revanche, veillez à mettre en vente au moins deux tiers des participations afin de maintenir votre attractivité aux yeux de l’acheteur.

Raison 3: manque de transparence lors du processus de négociation

Par expérience, le vendeur et l’acheteur se trouvent plus ou moins sur la même longueur d’onde au début des négociations. Au fil des entretiens, cependant, les attentes peuvent évoluer, de même que les exigences en termes de conditions contractuelles. Ce qui se produit d’ordinaire quand, en tant que vendeur, vous retenez consciemment des informations au sujet de la société – soit par crainte que des données sensibles soient divulguées trop tôt, soit parce que vous n’avez en soi aucun intérêt à partager ces informations. En effet, il n’est pas nécessaire de partager toutes les informations avec les parties prenantes à un stade précoce des négociations. En revanche, les conséquences peuvent être fâcheuses si ces informations se retrouvent, par inadvertance, sur la table des négociations. Les acheteurs potentiels peuvent interpréter cette rétention de documents comme un manque de transparence et y percevoir un risque pour la poursuite des négociations.

La solution
Établissez dès le départ une base de confiance en divulguant certaines informations de manière anticipée et en faisant ainsi preuve de transparence. Veillez en particulier à ce que les informations que vous ne souhaitez partager qu’ultérieurement avec les acheteurs potentiels ne portent pas atteinte à cette relation de confiance indispensable. Donnez, à tout moment, aux acheteurs le sentiment que vous négociez de façon absolument ouverte et transparente.

Un conseiller expérimenté peut aisément juger quels prospects viennent uniquement frapper à la porte pour obtenir des informations concernant la société et lesquels poursuivent des intentions d’achat sérieuses. Le conseiller vous exposera en outre quelles informations vous devriez partager avec les acheteurs potentiels et à quel moment.

Raison 4: perspective extérieure insuffisante sur les négociations

Les négociations fructueuses nécessitent un guidage, comme l’illustre un exemple tiré de la pratique: deux médecins spécialistes qui souhaitaient acquérir un cabinet médical recevaient régulièrement du vendeur de nouvelles ébauches de contrat de vente. À chaque fois, celles-ci contenaient de nouveaux actifs qu’il s’agissait d’indemniser en sus. De quoi donner aux intéressés l’impression qu’on voulait les gruger, d’autant plus que le prix de vente était corrigé à la hausse à chaque nouveau contrat.

Le vendeur ayant ainsi compromis les négociations, les médecins ont rejeté l’offre. Les nombreux projets de contrats étaient le fait de plusieurs conseillers, tous impliqués parallèlement dans le processus de vente et responsables de différents aspects du processus d’achat. Il va de soi que le conseiller fiscal et financier ou l’administrateur fiduciaire ne s’intéressaient qu’à leurs propres points contractuels. Une perspective globale sur les négociations faisait donc défaut, de même qu’une instance d’accompagnement qui aurait permis d’épargner aux acheteurs potentiels une marée continue de nouvelles exigences.

La solution
Faites appel à un expert externe qui peut se procurer une vue d’ensemble de la situation globale. Ce faisant, vous éviterez que chaque conseiller tente d’imposer individuellement ses exigences. Un spécialiste externe – dans la plupart des cas un conseiller M&A – garantira un aperçu général au niveau factuel et technique. Il structure et coordonne par ailleurs les négociations en menant les discussions sur un pied d’égalité et en veillant à ce que les négociations aboutissent à un résultat positif pour toutes les parties.

Raison 5: le vendeur ne parvient pas à se séparer de son entreprise

Bon nombre d’entrepreneurs prospères éprouvent de la difficulté à se séparer de leur société. Les raisons sont multiples.
Certains d’entre eux estiment, à tort ou à raison, qu’ils sont encore irremplaçables. L’œuvre de toute une vie n’est jamais achevée et ils peinent à envisager un successeur digne de ce nom au sein de leur propre famille, dans l’entreprise ou ailleurs. Les obstacles émotionnels peuvent avoir des répercussions négatives sur les négociations de vente.

La solution
En votre qualité d’entrepreneur, accordez-vous suffisamment de temps pour vous préparer aux changements qui se dessinent et pour favoriser ainsi les négociations – y compris avec des candidats externes. Dites adieu à l’attente de trouver un successeur qui fonctionne exactement comme vous. Concentrez-vous plutôt sur un successeur auquel vous témoignez beaucoup de sympathie et de confiance.

Esther Haupt

Esther Haupt

Transaction Manager UBS Suisse

Esther Haupt encadre les transactions d’entreprises (MBO, MBI, acquisitions et financements de la succession) sur l’ensemble du marché suisse – du conseil à la mise en œuvre. Son domaine de compétence réside dans la structuration et la gestion des financements d’acheteurs.

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