Fondamentaux, politique ou facteurs techniques ?
Perspectives macroéconomiques et par classes d’actifs - Août
L’essentiel
L’essentiel
- La volatilité s’est fortement accrue en juillet, plombant les positions les plus prisées. Les fondamentaux ont joué le rôle de catalyseur selon nous, mais l’ampleur de la correction découle essentiellement de facteurs techniques. Nous estimons que les événements sur le front politique ont eu un impact limité sur les marchés dans leur ensemble.
- Nous restons d’avis que la solidité de la croissance et l’amorce d’un cycle d’assouplissement justifient une surpondération des actions, et l’amélioration récente de l’ampleur du marché devrait se poursuivre.
- Les conditions techniques étant susceptibles de rester problématiques en août et en septembre, nous allégeons notre exposition en réduisant nos surpondérations dans l’ensemble de nos portefeuilles.
Les fluctuations importantes des marchés durant la période estivale sont de plus en plus fréquentes et le mois de juillet n’a pas fait exception, avec des fluctuations prononcées d’un large éventail d’actifs. Certaines des positions les plus prisées, comme les méga-capitalisations technologiques américaines ou les opérations de portage financées par le yen japonais, ont essuyé de lourdes pertes.
Les investisseurs se demandent si la volatilité récente découle principalement des fondamentaux, des enjeux politique ou des conditions techniques. Bien que les fondamentaux aient joué un rôle dans la correction, l’évolution des cours a été exacerbée par des facteurs techniques. Nous ne pensons pas que la tendance des marchés en juillet ait été principalement dictée par les développements politiques aux États-Unis.
Dès lors, notre opinion globalement positive à l’égard des marchés, qui repose sur le maintien de perspectives fondamentales solides, reste inchangée. Toutefois, nous pensons qu’une légère réduction du risque s’impose sachant que les conditions techniques pourraient rester difficiles jusqu’à la fin de l’été (voir Allocation d’actifs).
Figure 1 : Rotation prononcée des marchés
Catalyseurs fondamentaux et extensions techniques.
Catalyseurs fondamentaux et extensions techniques.
L’élément déclencheur initial de la volatilité du mois de juillet est venu de données positives : l’inflation sous-jacente aux États-Unis en juin est ressortie inférieur de 0,1 pp aux attentes pour le deuxième mois consécutif. Outre la révision par le président de la Fed Jerome Powell de son évaluation du marché de l’emploi de « tendu » à « équilibré », le marché a reçu la confirmation d’un cycle d’assouplissement imminent, ce qui a remis en question le thème du maintien de taux élevés pour une période prolongée.
Les anticipations concernant la baisse des taux d’ici la fin de l’année se sont rapprochées de trois réductions de 25 pb et les taux américains à 2 ans ont enregistré leur plus forte baisse mensuelle depuis le début de l’année. La perspective d’un cycle plus long et d’un assouplissement des conditions de financement ont soutenu les entreprises qui présentent un bilan plus fragile, entraînant une rotation en faveur des petites capitalisations et amorçant une série de corrections des positions très entourées.
Figure 2 : Performances des principaux actifs depuis la publication de l’IPC le 10 juillet
Étonnamment, le Russell 2000 a surperformé le groupe des « Magnificent 7 » de 25 % au cours des deux semaines qui ont suivi la publication de l’IPC. Les prévisions de bénéfices des méga-capitalisations technologiques pour le deuxième trimestre semblaient certes ambitieuses, mais la rapidité et l’ampleur de la rotation sont dues selon nous à un positionnement déséquilibré. Les données de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) montrent qu’avant la publication de l’IPC, les fonds à effet de levier étaient vendeurs sur les petites capitalisations, tandis que les investisseurs de tous types étaient acheteurs sur le Nasdaq.
Un deuxième élément déclencheur est survenu lorsque les autorités japonaises sont intervenues sur le marché des changes et, surtout, ont appelé la Banque du Japon à normaliser sa politique. Combinée à la baisse des rendements américains, cette situation a entraîné une hausse de près de 5 % du yen par rapport au dollar en deux semaines, correspondant à un écart-type de 2,3 depuis le début de ce cycle. En outre, l’ampleur de la hausse a été plus importante que ne le justifiait cette actualité, sachant que les positions courtes sur le yen affichaient leur niveau le plus élevé depuis dix ans, selon la CFTC.
Une dynamique similaire s’est manifestée sur différents marchés. D’autres devises de financement (CHF et CNH) relativement survendues ont bénéficié du dénouement d’opérations de portage positives. Les cours du cuivre ont chuté de 10 % en 10 jours alors que le positionnement long sur les contrats à terme atteignait son niveau le plus élevé depuis trois ans.
Les événements politiques n’ont pas tant dicté la tendance des marchés
Les événements politiques n’ont pas tant dicté la tendance des marchés
La probabilité accrue d’une deuxième présidence Trump les deux premières semaines de juillet a renforcé la perception d’opérations de rotation de nature disruptive. Nous notons toutefois que les petites capitalisations ont surperformé tout au long du mois, alors même que les cotes des paris se resserraient pour dénoter une course à la présidence plus serrée la deuxième quinzaine de juillet.
Déconnectant plus encore la tendance du marché des facteurs politiques, la taux courts américains ont grimpé davantage que les taux longs, dénotant un marché qui se prépare à un cycle de baisse des taux. Si les enjeux politiques en avaient été la cause, une hausse des taux longs supérieure à celle des taux courts associée à un assouplissement de la politique budgétaire aurait été plus appropriée.
À l’heure actuelle, nous choisissons de ne pas nous positionner dans l’anticipation des élections américaines pour deux raisons : premièrement, le résultat est trop difficile à prédire, les démocrates se ralliant derrière la vice-présidente Harris et leur collecte de fonds ayant fortement augmenté récemment. Deuxièmement, nous pensons que l’impact net des politiques de Donald Trump sur l’économie et le marché est plus incertain que lors de son premier mandat. Cela s’explique par une large série de propositions sur le commerce, l’immigration, la fiscalité, l’énergie, la déréglementation et le dollar dans un contexte économique marqué par une inflation plus élevée et un creusement des déficits.
La politique monétaire et les facteurs techniques ont été les principaux moteurs des marchés en juillet et continueront probablement de peser plus lourd que le risque politique tout au long de la période estivale.
Figure 3 : Russell/Nasdaq et cote PredictIt sur une victoire de Trump
Accent sur les fondamentaux
Accent sur les fondamentaux
Gardons-nous de ne pas interpréter de façon trop négative la tendance récente du marché : nous estimons en effet que les conditions techniques ont joué un rôle plus important qu’à l’accoutumée. En fait, l’évolution des cours sous-jacents représente un élargissement salutaire du groupe des valeurs dominantes du marché, bien que la rapidité de cette évolution ait de quoi surprendre. Cet élargissement au-delà d’un groupe restreint de valeurs technologiques dénote davantage la conviction des investisseurs concernant une extension du cycle économique.
Dans l’ensemble, les données objectives continuent de laisser entrevoir des perspectives cycliques favorables aux États-Unis, avec une croissance du PIB réel à un taux annualisé de 2,8 % au deuxième trimestre, soutenue par la vigueur des dépenses des ménages. Les revenus réels continuent de progresser de façon saine, tout comme les bénéfices des entreprises. L’assouplissement monétaire attendu devrait atténuer la pression sur les secteurs sensibles aux taux d’intérêt comme le logement et l’industrie manufacturière.
Nous prenons acte de la détente du marché de l’emploi, et c’est là notre indicateur principal pour surveiller les risques entourant notre opinion. Nous sommes également attentifs aux risques négatifs qui pèsent sur la croissance en dehors des États-Unis, notamment suite aux statistiques décevantes à cet égard en Europe et en Chine. Toutefois, le reflux de l’inflation sous-jacente permet également aux banques centrales américaines et étrangères d’assouplir leur politique, ce qui atténue les risques baissiers et conforte les perspectives.
La Fed étant susceptible d’amorcer un cycle d’assouplissement mesuré en septembre (soutenue par une inflation plus modérée), nous entameront bientôt une période d’assouplissement synchronisé au niveau mondial (ex. Japon). Cela devrait créer un contexte favorable aux actifs risqués, les investisseurs étant de plus en plus convaincus que les banques centrales amortiront le choc en cas de nouveau ralentissement de l’économie.
Figure 4 : Vers un cycle mondial de plus en plus synchronisé de baisse des taux
Malgré la solidité du contexte macroéconomique, les conditions techniques restent difficiles dans l’immédiat. En premier lieu, malgré l’ajustement des cours, nous n’observons pas de changement important en termes de positionnement. Le positionnement spéculatif reste résolument acheteur sur les valeurs technologiques américaines et vendeur sur différentes devises de financement.
En second lieu, au niveau des indices, nous sommes attentifs aux tendances saisonnières qui font apparaître une détérioration de la performance des actifs risqués et une volatilité accrue en août et en septembre. Compte tenu des inquiétudes persistantes entourant l’état de l’économie mondiale et de la course indécise à la présidence américaine, la volatilité pourrait aisément s’accroître durant la période d’illiquidité à venir.
Figure 5 : Moindre saisonnalité en août et en septembre
Allocation d’actifs
Allocation d’actifs
Nous estimons que la solidité persistante de la croissance et l’amorce d’un cycle d’assouplissement justifient une surpondération des actions,. Nous anticipons un nouvel élargissement de l’ampleur du marché et une toile de fond plus saine pour les gérants actifs à la faveur de la moindre concentration du marché. À très court terme, nous prenons acte de la fragilité accrue de l’environnement technique et nous allégeons notre exposition en réduisant la surpondération des actions dans l’ensemble de nos portefeuilles.
Nous sommes neutres sur la duration compte tenu du degré d’assouplissement déjà intégré dans les cours, à supposer un scénario d’atterrissage en douceur. Toutefois, la duration continue de jouer un rôle important dans les portefeuilles équilibrés pour se protéger contre des scénarios économiques négatifs, d’autant plus que les risques de ralentissement de la croissance et de hausse de l’inflation sont désormais plus équilibrés. Les obligations restent selon nous la meilleure couverture contre d’éventuelles mauvaises surprises sur le marché de l’emploi.
De même, nous pensons que le yen pourrait bénéficier du durcissement de la politique monétaire japonaise et d’une détérioration de la conjoncture. Nous restons neutres vis-à-vis du crédit, sachant que les rendements globaux restent attractifs dans un contexte dans lequel notre scénario de base table sur une économie qui demeure résiliente.
Opinions concernant les classes d'actifs
Opinions concernant les classes d'actifs
Le graphique ci-dessous présente le point de vue de notre équipe Allocation d’actifs concernant l’attractivité globale des classes d’actifs au 29 juillet 2024. Les cercles colorés dénotent notre signal global concernant les actions, les taux et le crédit au niveau mondial. Le reste des notations porte sur l’attractivité relative de certaines zones au sein des classes d’actifs actions, obligations, crédit et devises. Sachant que le tableau des opinions par classes d’actifs ne couvre pas l’ensemble des classes d'actifs, le signal global net peut être relativement négatif ou positif.
Classe d’actifs | Signal global / relatif | Point de vue d’UBS Asset Management | |||
Actions mondiales | Surpondération | Contexte favorable du point de vue macroéconomique et des bénéfices face à l’assouplissement de la politique des banques centrales, mais allègement de l’exposition compte tenu des facteurs techniques et saisonniers. | |||
États-Unis | Surpondération | Nous anticipons un nouvel élargissement de la performance des places boursières alors que la Fed prolonge le cycle. | |||
Europe | Neutres | Rétrogradée à neutre en raison de statistiques économiques et de bénéfices décevants. | |||
Japon | Neutres | Poursuite de la réforme des entreprises et bénéfices solides contrebalancés par la vigueur retrouvée du yen. | |||
Marchés émergents | Neutres | Les marchés émergents pourraient surperformer en amont des élections américaines, notamment en raison des doutes persistants entourant la croissance chinoise. | |||
Emprunts d’État mondiaux |
Neutres |
Les obligations sont plus attrayantes avec des signes plus manifestes de recul de la croissance/de l’inflation. Nous continuons de privilégier les actions.
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Bons du Trésor américain | Neutres | La modération progressive de la croissance et de l’inflation améliore leur capacité de couverture, mais nous n’anticipons pas de surperformance significative par rapport aux niveaux intégrés dans les cours. | |||
Bunds | Neutres | La BCE va assouplir sa politique dans un contexte de ralentissement de l’inflation, mais les tensions sur le marché du travail et l’amélioration de la croissance limitent le degré d’assouplissement. | |||
Gilts | Neutres | La Banque d’Angleterre souhaite réduire ses taux face au ralentissement de l’emploi, mais la persistance de l’inflation dans le secteur des services réduit considérablement sa marge de manœuvre. | |||
Crédit mondial | Neutres | Les spreads de crédit sont serrés mais leur niveau n’est pas illogique sachant que les taux de défaut restent bas. Le portage sur le haut rendement européen et asiatique est le plus attractif. | |||
Crédit Investment Grade | Neutres | Les spreads sont proches de leurs plus bas cycliques habituels, tandis que les fondamentaux des entreprises restent favorables. Les performances seront probablement dictées par le portage. | |||
Crédit à haut rendement | Neutres | Le potentiel de nouvelle hausse des prix est limité, les spreads avoisinant les 3 %. Les rendements globaux restent toutefois attractifs. Nous préférons le haut rendement européen à celui américain. | |||
Dette émergente en monnaie forte | Neutres | Les bonnes nouvelles concernant les restructurations ont été largement intégrées dans les cours ces derniers mois. Des performances issues du portage semblent désormais probables. | |||
Devises | - | - | |||
USD | Surpondération | Haussiers par rapport aux monnaies du G10, un assouplissement plus marqué de la Fed étant pris en compte rapport aux autres pays du G10. L’USD offre une couverture positive en termes de portage contre des scénarios défavorables. | |||
EUR | Sous-pondération | Les écarts de taux devraient se retourner en faveur des États-Unis en raison de perspectives de croissance européenne plus modérées | |||
JPY | Neutres | La pression croissante exercée sur la Banque du Japon l’incitant à normaliser sa politique implique un resserrement des écarts de taux | |||
Monnaies émergentes | Neutres | Environnement plus favorable pour le portage lié aux monnaies émergentes face au regain de volatilité.
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Matières premières | Neutres | Le baril de Brent se situe entre 75 et 90 dollars. |
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